Solution [Sam/Real]

[==> Suite de "Une conférence bien particulière"]

Deux jours, huit heures et quarante trois minutes.

Spock n'avait pas vu le Capitaine Kirk depuis leur dernière entrevue. A son retour à bord de l'Enterprise, malgré la situation avec son supérieur, Spock avait entrepris de travailler sur les travaux d'aménagement des nouveaux moteurs du vaisseau. Il s'était attelé à sa tâche jour et nuit, méditant peu, mangeant peu, mais suffisamment pour maintenir son énergie à un niveau constant. Et pour ne pas avoir à se préoccuper d'une situation dont les enjeux et les significations lui échappaient.

Mais sa dernière méditation fut ébranlée par une vision que les humains auraient pu dire de cauchemardesque, signe que son esprit était bien plus troublé qu'il n'avait voulu l'admettre dans les premiers temps. Et lorsqu'il y avait réfléchi, l'évidence de la marche à suivre lui était apparu d'une façon plus éclairée.

Il avait d'abord pensé à démissionner. Et gardait cette hypothèse en cas de refus de son supérieur. Il était dorénavant assuré que les nouveaux sentiments du Capitaine Kirk à son égard changeraient inévitablement sa façon de se comporter avec lui. C'était tout le problème des émotions. Lorsqu'ils entraient en compte et qu'ils étaient démesurés ou inexplicables, ils engendraient forcément des complications.

Il s'était renseigné sur le fait que le Capitaine ne quittait pratiquement plus ses quartiers. Il ne s'était pas senti assez sûr de lui avant aujourd'hui pour aller affronter son supérieur et éclaircir la situation. Mais ils ne pouvaient décemment pas laisser la situation s'envenimer encore, sinon il serait obligé de demander une autre affectation. Il devait au moins essayer de trouver une solution alternative. Il ne voulait pas que sa collaboration avec Kirk ne prenne fin aussi subitement et sur ces bases.

Voilà pourquoi il toquait maintenant à la porte des quartiers du Capitaine Kirk, les mains croisées dans le dos, les épaules légèrement voutées, seul signe extérieur de son anxiété.

Pendant deux jours, le capitaine vécu comme un reclus. Il n'était jamais sorti de ses quartiers et pas même McCoy n'avait réussi à lui faire mettre le nez dehors.

Il s'était contenté de somnoler, parfois de manger. Pas une seule fois, il n'avait ouvert un livre. Une chose assez grave chez lui. La dépression s'installait de plus en plus et, par des cernes profondes, se lisait sur son visage.

Puis, la sonnerie retentit une nouvelle fois. Jim pensait que McCoy n'avait toujours pas abandonné l'idée de lui remonter le moral. Quelle ne fut sa surprise lorsqu'il vit son officier en second de l'autre côté de la porte.

-Spock, bafouilla-t-il. Euh, je vous en prie entrez.

Il s'éacrta pour laisser passer le vulcain. Ce dernier était impassible, comme toujours. Essayant de raisonner avec logique, Kirk pensa que son ami était venu pour demander l'autorisation de son supérieur pour un transfert sur un autre vaisseau.

Cette pensée effraya Jim. Il ne voulait pas.

-Spock, avant que vous ne demandiez quoique ce soit, je voudrais vous dire que je suis vraiment désolée pour le comportement inadmissible que j'ai eu envers vous.

Voyant que le vulcain ne comptait pas l'interrompre, il continua.

-Je vous aime, c'est une chose qui ne changera jamais, mais ... je vous en prie ne partez pas. J'étoufferai ces sentiments si c'est ce que vous voulez. Si c'est le seul moyen de vous faire rester à bord. Je préfère rester votre ami que vous voir partir très loin. Je ... Je ne pourrai pas le supporter. S'il vous plait, ne partez pas.

Son ton n'était pas celui d'un capitaine. Mais c'était le cadet de ses soucis. Tout ce qui l'intéressait c'était la garantie que son amour et ami reste à ses côtés, même sans partager ses sentiments.

Lorsque Kirk lui ouvrit la porte de ses quartiers, Spock sentit son coeur s'accélérer inexplicablement. Il refoula la nervosité qui menaçait de le submerger et entra d'un pas calme mais décidé lorsque son supérieur l'invita à entrer. Comme il s'y était attendu, sa présence était source d'embarras, tout dans l'attitude de l'humain le reflétait. Il voulut donc aller droit au but et faire bref mais Kirk emboita la conversation avant même qu'il n'ait pu placer un mot.

_Spock, avant que vous ne demandiez quoique ce soit, je voudrais vous dire que je suis vraiment désolé pour le comportement inadmissible que j'ai eu envers vous.

La rétractation de Kirk sur leur dernier échange le soulagea avec une intensité qu'il n'aurait pas pensé. Il pencha doucement la tête en avant pour signifier à son supérieur qu'il acceptait ses excuses.

_Je vous aime, c'est une chose qui ne changera jamais, mais ... je vous en prie ne partez pas. J'étoufferai ces sentiments si c'est ce que vous voulez. Si c'est le seul moyen de vous faire rester à bord. Je préfère rester votre ami que vous voir partir très loin. Je ... Je ne pourrai pas le supporter. S'il vous plait, ne partez pas.

Spock aurait pu s'étonner des paroles du Capitaine, s'il n'était pas plus déstabilisé encore par le ton qu'il avait employé. Il n'avait encore jamais entendu son supérieur littéralement supplier de cette manière. Il sentit une étrange sensation lui vriller l'estomac mais il reprit instantanément le contrôle de lui-même. Il ne devait absolument pas se laisser toucher par les émotions alors que c'était déjà le cas de Kirk. Pas s'il voulait arriver à comprendre.

_Capitaine, Jim, je tenais avant tout à m'excuser pour le comportement que j'ai eu aussi avec vous. Il aurait été logique de votre part de demander ma démission mais je vois que ce n'est pas le cas. Je vous en remercie.

Même si son ton était plus amical que froid, Spock gardait son entier professionnalisme. La situation le tendait pourtant profondément.

_Puis-je vous demander comment vos sentiments en sont arrivés à changer ? Nous connaissons tous les deux votre tendance à entamer des romances qui ont peu de chances de durer. Ai-je eu un comportement qui vous a fait pensé que j'étais ouvert à ce genre d'échange ?

Malgré son statut d'officier en second et la tension que ce genre de conversation pouvait éveiller en lui, de façon illogique certes, le vulcain voulait comprendre le comportement humain, plus encore celui de son supérieur et ami. S'il avait agi de mauvaise façon, il devait en avoir conscience pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise.

Les paroles de Spock lui firent mal. Elles avaient été prononcées de façon innocentes par le vulcain, mais ce dernier venait littéralement de dire qu'il ne voudrait jamais de relations.

Cependant, Kirk ne recula pas devant l'occasion de s'expliquer. Il ne voulait pas vivre avec le regret de ne pas avoir tout tenté.

-Vous n'y êtes pour rien Spock, commenca-t-il. C'est moi. Ou plutôt, les évènements m'ont changé. Vous savez, j'ai toujours pensé que je mourrai seul. Que je n'aurai jamais de famille à moi. Si je fréquentais des femmes, c'était pour me donner l'illusion que ce que je redoutais n'arriverai pas. Que je ne serai plus seul.

Jamais Jim n'avait dit avec franchise ses pensées, à qui que ce soit. Pas même sa mère en qui il avait la confiance la plus absolue.

-Mais au fond de moi je savais que ça ne restait qu'une illusion. Je n'y croyais pas. Puis, un jour j'ai constaté que j'avais une famille. L'Enterprise et son équipage. Rien ne dure éternellement et un jour, mes hommes partiront, prendrons des chemins différents. C'est la vie.

Le capitaine sentit une larme piquer son œil, mais refusa de la laisser couler. Il n'était pas encore tombé aussi bas.

-Mais quand je repense à tout ce qu'on a vécu. J'ai trouvé une constance : vous. Vous étiez là, depuis le début, à mes côtés. Vous avez pris des risques inconsidérés, parfois mêmes illogiques pour me sauver. J'en ai fait de même car je refusais que vous ne soyez plus là. Et j'ai finalement compris que je voudrais être avec vous pour toujours. De fil en aiguille, une amitié s'est transformée en amour. Oh j'ai eu du mal à m'y faire. Vous êtes un homme et je n'ai jamais... Mais je l'ai accepté parce que c'est la vérité.

Voilà c'était dit.

-Je ne peux pas mieux l'expliquer que ça Spock. Car je n'ai moi même eu aucun contrôle sur ce changement. Et j'avoue ne pas avoir envie que ça change. Même si je dois souffrir, être simplement avec vous m'a procuré plus de bonheur que j'en ai jamais éprouvé de toute ma vie. Et comme n'importe quel humain, j'ai seulement voulu que ce bonheur continue encore et encore.

Il s'était abstenu de regarder le vulcain pendant la conversation. Et maintenant il attendait le verdict.

Spock écouta attentivement le discours de son Capitaine. Malgré les derniers évènements qui s'étaient produits sur Vulcain, Kirk semblait avoir retrouvé son calme. Il ne trouva que sagesse et réflexion dans chacun des mots qu'il utilisait pour lui expliquer comment ses sentiments avaient changé. Le vulcain fut quelque peu déconcerté par le fait qu'il trouvait effectivement une certaine logique à l'évolution des sentiments de son supérieur à son égard. Après tout, Kirk avait toujours montré une certaine frivolité sentimentale durant les années qu'il avait été amené à passer sous son autorité. Il ne comptait plus le nombre de femelles, humaines ou non, qui étaient passées dans ses bras.

Spock chassa rapidement la lueur de colère qui le traversa en pensant aux conquêtes de Kirk et s'aperçut que le changement d'objet de ses sentiments pour passer d'une femme à un homme n'était pas si étonnant en soi quand il s'agissait d'un homme comme le Capitaine Kirk. Malgré cette constatation, le vulcain remerciait intérieurement son ami d'éviter son regard. Il aurait été difficile pour lui aussi de prendre conscience de ce genre de révélation en affrontant en plus le regard de Kirk.

_Vous êtes une constance pour moi aussi, Capitaine. Je suis et resterai toujours votre ami. Je ne peux hélas répondre à vos attentes émotionnelles. Je ne ressens pas ce genre de besoin même s'il est vrai que notre amitié s'est approfondi au fil des années.

Spock ne comprit pas son besoin soudain d'éviter son ami du regard. Il n'était jamais évident d'éconduire une autre personne, encore moins son supérieur. Mais il était évident maintenant que les choses ne pourraient pas redevenir comme avant après ça. Contrairement à ce qu'il s'était attendu, les sentiments de Kirk étaient mûrement réfléchis. Il ne s'agissait pas d'une passage mais bien d'un profond sentiment ancré et qui avait évolué tout à fait naturellement. Le Capitaine se trompait s'il pensait pouvoir continuer à travailler avec lui dans les mêmes conditions. Lui, en aurait été capable.

Mais il n'était pas dans la même position que Kirk. Et c'était bien ce qui se révélait être le plus dur pour lui maintenant et pour ce qu'il s'apprêtait à dire.

_Nous vous connaissons suffisamment bien tous les deux, Capitaine, pour dire qu'il vous sera très difficile de continuer à travailler avec moi comme ce fut le cas auparavant. Vous êtes un homme profondément émotif, et cela fait partie de vos atouts et qui fait de vous un Capitaine de niveau supérieur. Cependant, les choses vont se dégrader avec le temps. J'ai appris à vous connaitre suffisamment bien pour le deviner malgré vous.

Spock prit une profonde inspiration et serra ses poignets derrière son dos.

_Vous trouverez ma démission sur votre bureau dès ce soir. Je suis désolé, Jim.

Il se retourna et quitter les quartiers du Capitaine Kirk.

Dire qu'il n'était pas littéralement dévasté aurait été un mensonge.

Depuis que Jim avait bel et bien reçu la lettre de démission de Spock, il était devenu une ombre. La machine était lancée, et il ne pourrait l'arrêter. Le capitaine Kirk s'avouait finalement vaincu.

Il répondit avec affirmation à la demande de son officier en second. Puis, il fonctionna en pilote automatique, même devant le Vulcain. Il s'adressait à lui de la même façon qu'aux autres : avec (un peu trop de) professionnalisme.

Jim n'avait plus d'enthousiasme pour rien. Son plat préféré n'avait plus de goût et le délaissait après la première bouchée, commander l'ennuyait autant que s'il s'était trouvé dans un bureau rempli de paprasse.

Bones s'était bien entendu douté de quelque chose, et jusqu'ici, Kirk avait réussi à éviter le sujet. Il ne voulait pas en parler.

Il se disait que, peut être, une fois Spock parti, il pourrait tourner la page (bien que, réellement, au plus profond de lui, il savait que c'était faux). L'heure du transfert allait bientôt arriver et le capitaine attendait ce moment à la fois comme un espoir et un drame.

Spock avait minutieusement rassemblé ses affaires et mit en route le processus nécessaire à son retour sur vulcain. Il s'était plongé dans son travail avec une concentration et une applicable digne des plus grands vulcains. S'efforçant au passage de mettre fin à la tension qui grandissait dans ses muscles au fur et à mesure que la date de son départ approchait.

Il était bien trop souvent à son goût en proie à un sentiment néfaste qu'il avait définit comme du regret. Ce fut pour cela qu'il força son esprit à se concentrer sur les démarches à venir et qui lui permettait aujourd'hui de continuer à faire son travail aussi bien avant son départ.

Il n'avait mis personne au courant de son départ, à part le Capitaine Kirk bien entendu, estimant que l'information n'avait aucunement besoin d'être diffusée en dehors des deux personnes concernées.

Il était maintenant debout devant la porte des quartiers du Capitaine. Le doute l'assaillait quant à la marche à suivre et de savoir s'il devait ou non prévenir oralement son supérieur de son départ. En tant qu'officier, il n'avait aucune obligation si ce n'était par politesse. En tant qu'ami, son esprit lui disait que la coutume humaine aurait voulu qu'il parle de vive voix à Kirk.

Mais après le comportement que Kirk avait eu envers lui durant ces derniers jours, un professionnalisme profondément marqué et presque froid, Spock décida qu'il n'était finalement pas judicieux de se présenter à lui à nouveau. Kirk vivait mal sa démission, il pouvait aisément le deviner à partir de son comportement et de ses gestes de ces dernières 24 heures.

Le vulcain resta plusieurs minutes debout devant la porte des quartiers de son Capitaine avant de finalement faire un pas en arrière et repartir vers la salle de téléportation.

C'était mieux ainsi, pour tout les deux. Il n'avait jamais cessé de se le répéter depuis sa dernière entrevue avec Kirk. Pourtant, il sentait bien malgré lui son estomac se nouait et la température de son corps refroidir au fur et à mesure qu'il s'éloignait de son ami et du vaisseau.

Ce ne fut qu'une fois téléporté hors de l'Enterprise et installé dans un vaisseau mis à sa disposition par l'ambassade vulcaine, que Spock trouva l'énergie de se plonger méditation pour purger son esprit des émotions négatives qui l'avaient envahi.

Jim était allongé sur son lit. Il s'ennuyait et ne parvenait pas à penser à autre chose que le départ de Spock dans moins d'une heure.

Il s'en voulait d'avoir été froid. Il serait même prêt à parier que des étrangers à l'affaire aient remarqué ce changement. Habituellement, il parlait de façon plus enjouée, se montrait gentil avec tout le monde. L'Enterprise et son équipage était une famille et non des "employés". Ca faisait toute la différence dans un comportement.

Kirk voulait, souhaitait de toutes ses forces, que le Vulcain change d'avis. Qu'il vienne le trouver et lui dise qu'il ne partait plus. Mais le réveil indiqua qu'il restait moins de 2 minutes avant le départ de son ami. Il ne viendrait pas le voir avant de partir.

Mais Jim, lui, voulait le voir. Au moins une toute dernière fois. Il se leva en trombe et couru vers la salle de téléportation.

A son arrivée, Spock venait tout juste de finir de se dématérialiser. Son ami était parti et lui était arrivé trop tard.

Le capitaine sentit son cœur se serrer encore plus.

[RP clos ==> suite pour le personnage de Spock sur Vulcain]