Frisson part. 8 (Selek/Syhta)

Spock posa alors les doigts sur son visage, selon un schéma précis. Il plongea son regard dans le sien, puis leurs esprits fusionnèrent. Le Vulcain se rendit compte que ses capacités télépathiques étaient moins performantes quand divers souvenirs se mêlèrent à ce qu'il souhaitait partager avec Jim. L'Arche katrique. Les montagnes de Vulcains, qui s'effondraient en craquant, soulevant des nuages de poussières et de sable. La terre qui tremblait sous leurs pieds. Le picotement caractéristique de la téléportation, et Amanda Grayson qui chuta, en criant le nom de son fils, juste sous ses yeux. Le vide dans son coeur. Le chagrin. La colère.
Ses émotions ravivés, le lien fut instable quelques instants, faisant alterner sensations réelles et mentales, puis Spock s'efforça de reprendre le contrôle, et il se visualisa, dans une sorte de salon chaleureux. A ses côtés, sur le canapé confortable, se tenait son amant. Il se tourna vers lui, et leur échange se déroula dans ce décor.
- Je vais te montrer deux choses, dit-il en prenant l'une des mains dans la sienne. D'abord, je vais te faire ressentir ce que je suis en temps normal, lorsque mon esprit est logique et que mes émotions sont contrôlées.
Il ferma les yeux, et une grande paix coula entre eux. La sérénité. L'esprit était clair, fourmillant de détails, de logique, voyant l'essentiel dans chaque chose. Tout était scientifiquement rigoureux et méticuleux, tout était argumenté et prouvé. Mais ce qui était le plus marquant était cette paix. Il n'y avait aucun doute, que des certitudes. Le savoir, immense. Plus d'émotion négative, plus de jalousie, de colère, ni de chagrin. Il n'y avait que l'existence même des choses.
Le flux s'arrêta, et Spock reprit, prenant cette fois l'autre main de Jim.
- Maintenant, tu vas sentir ce que je ressens actuellement, en cet instant précis.
Ses paupières se baissèrent à nouveau, et cette fois, une puissante vague d'émotions déferla. Un véritable torrent de chagrin, de colère, d'amour, d'incompréhension, de doute. Chacune explosait en un brasier troublant les sens et l'esprit. Chacune renversait la logique sans la moindre résistance et prenait le contrôle de tout son être. Une grande douleur apparut. Intense, profonde, lancinante. Spock, le véritable, dans sa cabine, eut quelques tremblements, sa conscience flancha, tandis que la concentration du lien télépathique vidait ses dernières forces.

Le coeur de Jim se serra à la vue de ces souvenirs, ne sachant si c'était sa propre peine qu'il ressentait ou celle de Spock. Il se dit qu'il aurait aimé connaitre Amanda, il l'aurait surement beaucoup apprécié.
Il se laissa guider, laissant à son amant le temps qu'il lui fallait pour montrer ce qu'il désirait. Il perçu d'abord un calme agréable, surtout après les derniers événements, et il se sentit étonnamment détendu. Puis quand Spock lui fit sa seconde démonstration, l'humain sentit ses propres doutes, ses propres peurs remonter à la surface, comme un écho de celles de son compagnon. La douleur le prit de court, déstabilisant son esprit, et le vrai lui se recula violemment, par réaction face à la douleur infligée. Il rouvrit les yeux et les posa sur Spock, ne sachant pas quoi dire, encore choqué et déboussolé. Il comprenait parfaitement le problème... la différence entre le Spock normal et le Spock actuel. Il se mordit la lèvre, partagé entre sa volonté de faire ce qui était le mieux pour le vulcain, et son inquiétude de le voir purger ses émotions. Il demeura un temps silencieux, oralement comme mentalement, son esprit s'étant replié sur lui-même pour réfléchir. Puis il fini par retourner ses yeux vers son amant et parla d'une voix basse, brisée, mais compréhensive :
- on va mettre le cap sur la Nouvelle Vulcain... mais... j'aimerais que tu m'accordes juste une faveur... une fois là bas... je veux quand même qu'on en parle avec un guérisseur d'abord, juste pour être certain qu'il n'y a pas d'autres solutions... Et si... si vraiment il n'y en a pas, et que tu ne vas pas mieux avant qu'on arrive...
Il s'arrêta là, incapable d'ajouter un mot, rendu silencieux par la tristesse de laisser Spock là bas, pour un temps indéfini, sans nouvelles, sans certitudes qu'il lui reviendrait, ou même dans quel état il lui reviendrait...

Le visage de Spock était comme creusé, fatigué, malade. Il avait le souffle court, épuisé par la fusion mentale, et son front était parlé de sueur. Lentement, il hocha la tête, tenant tout de même le regard de son amant.
- J'accepte. Merci, Jim.
Avec lassitude, il leva le bras pour l'enlacer et son front vint se poser sur son épaule, lourdement. Il resta dans cette position pendant quelques instants, immobile et silencieux, avant de reprendre la parole.
- Je m'excuse de me montrer ainsi, je ne fais pas honneur à ton amour...
Ses yeux se fermèrent, bien qu'il ne s'endormit pas, et sa respiration se fit plus lente, plus profonde. Ses pensées se dirigèrent vers la Nouvelle Vulcain. Il n'y était encore jamais allé. On disait qu'elle ressemblait beaucoup à l'originale, bien que plus petite, et la flore était similaire. Il avait déjà hâte de sentir le soleil chaud sur sa peau, de profiter du calme des grands paysages rocheux et arides. Et de voir son père, même s'il ne l'avouerait pas. Leur relation avait toujours été en dents de scie, oscillant entre moments de tensions et de complicité.

Jim le serra doucement contre lui, passant un bras autour de sa taille et glissant une main dans ses cheveux :
- chut, calme toi avec ces histoires d'honneur s'il te plait... Il n'y a pas de honte à montrer à celui qu'on aime quand on est faible Spock... C'est comme ça que ça marche même... C'est à moi d'être fort pour toi quand tu en as besoin, et un jour ce sera moi qui serait faible et toi qui sera fort pour me soutenir...
Il l'embrassa sur le front, caressant doucement ses cheveux et envoyant à travers le lien des vagues d'amour et de réconfort. Il n'était pas plus rassuré concernant le kolinahr, mais il ferait ce qu'il fallait pour que son compagnon aille mieux... si c'était le seul moyen... Qu'il en soit ainsi. Mais il s'assurerait d'avoir bien tout tenté avant.. Car l'idée de ne pas voir Spock pendant des années peut être... Il n'était pas certain d'en être capable... ni dans son travail ni dans sa vie privée...

Le Vulcain hocha de nouveau la tête contre l'épaule de Jim. Son corps pesait lourdement sur le capitaine, n'ayant suffisamment de force pour se tenir redressé. Il leva alors lentement la main pour poser de nouveau ses doigts sur son visage, marmonnant faiblement en même temps :
- Laisse-moi te montrer... pour que tu ne doutes plus...
Spock se concentra intensément, rassemblant tous les fragments de son esprit, et provoqua une nouvelle fusion. Leurs esprits se mêlèrent de nouveau, mais plus difficilement, comme si les lambeaux de celui de Spock faisait rompre les fondations de la fusion. Malgré tout, le lien persista.
Sans un mot, il envoya à son amant une multitude d'images, de sensations, d'impression. Tout ce qui pouvait représenter l'ampleur de son amour pour lui, afin que Jim ne doute plus jamais de ses sentiments. Malheureusement, l'exercice lui coûta ses dernières forces, et il s'écroula sur lui, rompant le contact, retombant lourdement sur son torse.

Le capitaine ferma les yeux, laissant les sentiments de Spock chasser ses doutes et ses craintes et renvoyant en échangeant toutes les émotions positives qu'il ressentait quand ils étaient ensemble. Quand le lien se rompit et que son compagnon s'effondra, il le serra doucement contre lui un instant avant de l'allonger sur le lit. Il ramena le drap sur le vulcain et s'écarta un instant, allant jusqu'à l'interface de communication pour contacter la passerelle :
- Sulu ?
- Capitaine? J'écoute?
- mettez le cap sur la Nouvelle Vulcain Sulu, et... et rien de plus pour le moment.
- bien capitaine, nous changeons de cap dès maintenant.
- parfait, terminé.
Il retourna vers le lit et s'allongea près de Spock, l'attirant doucement contre lui, un bras passé autour de sa taille.
- Excuse moi Spock... Je sais que je n'aurais pas du douter de toi mais...
Il soupira doucement et ferma les yeux. Il avait ses propres doutes et ses propres blessures, tout comme le vulcain, et peut être que quand le moment serait venu, il lui montrerait... pour l'instant, son amant était trop fragile pour qu'il envisage de lui en parler. Malgré ce qu'il avait dit tout à l'heure, il n'était pas certain de se sentir si fort que ça, mais il fallait qu'il en ai au moins l'air... Pour Spock.