Frisson part. 8 (Selek/Syhta)

Après avoir croisé suffisamment de personnes venues s'enquérir de leur état de santé, Spock entra dans le mess, intérieurement agacé. Il avait dû laisser supposer des choses pour ne pas avoir à cacher la vérité, qu'il ne voulait d'ailleurs garder pour son entourage proche. Il n’était pas du genre à crier sur les toits comment il se sentait, et encore moins lorsqu'il s'agissait du pon farr. Il gardait encore le souvenir cuisant de sa honte.
En silence, il s'avança vers un réplicateur et commanda un repas vulcain composés de divers végétaux et céréales avant d'aller s'assoir à une table avec son plateau. Le contenu de son assiette lui faisait envie, faisant gronder son estomac, pourtant il attendit d'être rejoint par Jim pour commencer à manger.

le capitaine apprécia le retour des choses à la normale. Saluer l'équipage, échanger quelques mots en passant... Il aimait les imprévus, l'aventure et les problèmes mais là ça avait été 9 jours extrêmement longs et difficiles. Arriver au réplicateur il surchargea son plateau d'aliments plus ou moins normaux, mélangeant oeuf, steak, pancakes, cheesecake et bol de céréale auquel il ajouta du lait, avant de rejoindre Spock. Bones aurait hurlé s'il l'avait vu avaler tout ça, et lui aurait fait une liste d'aliments nécessaires à une alimentation équilibrée, mais qu'importe, il avait faim.
- bon appétit!
Dit il en entama son cheesecake avec entrain. Il émit un petit soupire de satisfaction en fermant les yeux. Il avait un faible pour les cheesecake... comme pour beaucoup d'autres desserts. Gourmand lui? jamais...

Le Vulcain resta parfaitement impassible en apparence, pourtant, intérieurement, il souriait de voir son compagnon si insouciant. Il commença lui-même à manger, piquant çà et là dans son assiette. Le goût n'avait pas le même que dans ses souvenirs, ceux que lui préparaient sa mère, mais il était tout de même agréable. A cette pensée, son coeur se serra légèrement. Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus penser à elle, avec leurs dernières aventures, et cette constatation le blessa. Elle lui manquait tellement. Son amour et sa confiance lui manquaient. Il fit pourtant de son mieux pour verrouiller sa tristesse au fond de son coeur, ne souhaitant pas inquiéter son compagnon. Son esprit, malgré le retour à la normale après le pon farr, était encore fragilisé et il ne voulait pas se laisser contrôler par ses émotions.

Jim dévora son repas avec un parfait illogisme humain, mélangeant sucré et salé, plat et dessert et visiblement pour lui c'était fantastique. Il prenait généralement soin de surveiller un temps soit peu ce qu'il mangeait, il était important pour lui, en tant que capitaine, de rester au mieux de sa forme, mais là il estimait qu'il avait bien mérité de se laisser aller. Tandis qu'il savourait son repas il lui sembla percevoir une légère baisse de moral venant de son compagnon, mais l'impression disparu presque aussitôt. Ne sachant s'il s'était trompé, et ne voulant pas le questionner il demeura silencieux, mais dans le doute, choisi d'envoyer ce qu'il aurait appelé des ondes positives, transmettant ainsi tout son amour pour le vulcain.

Malgré la muraille qui enfermait à présent son coeur et la certaine tristesse qui coulait en lui, Spock parvint à sentir le message envoyé par son compagnon. Il releva alors les yeux pour croiser son regard, avalant sa bouchée.
- Merci, Jim. Mais je vais bien.
Il reprit son repas, piquant différent légumes dans son assiette pour les porter à sa bouche avant d'abaisser la main, posant la paume sur un morceau de pain. Sa réaction fut violente, soudaine. Les yeux écarquillés, il retira sa main comme s'il s'était brûlé, et une légère impression de dégoût passa sur son visage, tandis qu'il fusillait du regard la miche coupable.

- d'accord...

Jim décida de ne pas insister pour le moment et de faire confiance à Spock, même s'il savait que celui-ci avait tendance à toujours affirmer que tout allait bien même quand il était mourant!
Il reprit son repas tranquillement, jusqu'à ce que la réaction subite et étrange du vulcain n'attire son attention. Il leva les yeux de son assiette et les tourna vers Spock, puis vers le bout de pain qui semblait être l'objet de son attention :
- un problème?

Le visage crispé, Spock fronçait les sourcils.
- Nous ne touchons jamais la nourriture avec nos mains, cela nous dégoûte, à cause de notre sensibilité. J'ai dû être troublé par quelque chose pour ne pas être vigilant...
Il laissa sa phrase en suspend, tuant du regard le morceau de pain qui restait trop gros pour être croqué. Il maudissait les réplicateurs de ne pas proposer de petites portions qu'il lui serait plus simple de manger. Les épaules base, le Vulcain saisit de nouveau ses couverts. Il ne pensait pas que repenser à sa mère le mettrait dans cet état. Il ne lui faisait pas honneur à se comporter de cette façon.

- oh... je comprends...
Jim se dit que c'était logique, mais aussi étrange pour lui humain qui ne se gênait pas pour manger avec ses doigts, quand la situation s'y prêtait bien sûr. La réaction de Spock l'avait amusée mais le vulcain lui semblait troublé. L'humain se demanda si c'était lié au Pon farr, comme un effet secondaire ou ce genre de chose. Il n'avait pas suffisamment d'information sur le pon farr pour saisir pleinement à quel point cet événement pouvait influencer le comportement d'un vulcain. Il reprit son repas non sans un sentiment d'inquiétude qu'il essaya de cacher comme il pu.

Le Vulcain sentit les émotions, et entendit les pensées de Jim. Il ne leva pas les yeux vers lui, continuant de manger en silence, mais son esprit se déverrouilla légèrement, lui offrant accès à ses propres réflexions.
- Tu te poses des questions, constata-t-il. Que veux-tu savoir sur le pon farr ?
Il pensait qu'il était plus prudent d'amener son compagnon sur une piste qui l'intriguait déjà, plutôt que de lui donner accès à sa souffrance actuelle. Pas qu'il voulait la lui cacher, même si ce n'était pas totalement faux, mais c'était quelque chose de trop personnel pour lui, et une émotion trop forte dans son coeur et dans son esprit, encore fragilisés.

Jim tourna les yeux vers son compagnon, surprit mais content que celui-ci lui rouvre, ne serait-ce qu'un peu, l'accès à son esprit. Il comprenait que le vulcain ne veuille pas tout lui montrer, mais l'humain allait avoir besoin de temps avant de bien saisir la nécessité, pour l'un comme pour l'autre, de garder leur pensées en partie cachées. Pour l'instant il avait l'impression d'être un peu comme un enfant à qui l'on dit d'aller dans sa chambre dès que son amant lui refermait son esprit.
- si j'ai compris ce que Bones et toi m'avaient dit... ça arrive régulièrement dans la vie d'un vulcain... en quoi... comment dire... ? A quoi ça sert, Comment ça "marche" ?

Le Vulcain eut un léger rictus à la question de Jim. Il ne trouvait plus cela embarrassant de discuter de cette phase biologique avec lui, à l'inverse, il ne comprenait pas réellement lui-même pourquoi son peuple devait subir cela.
- Le pon farr ne sert techniquement à rien, ce n'est que le vestige de vieilles traditions. Quand mon peuple s'est ouvert à la logique, la nature a répliqué en nous soumettant ainsi, tous les sept ans, à un dérèglement biochimique, afin que nous laissions libre court à nos émotions, dans le but de faciliter la reproduction. A part pour les Vulcaines qui ne ressentent aucune envie d'accouplement en dehors de leurs pon farr, celui-ci n'est pas réellement utile, puisque nous sommes un peuple conscient, qui peut choisir quand il désire se reproduire. Pour t'expliquer comment cela se met en fonctionnement, il faut que tu repenses à d'autres espèces qui vivent la même chose. Comme les saumons, sur Terre. Durant la période d'accouplement, ils doivent retourner dans le ruisseau où ils sont nés afin de se reproduire, ou mourir en essayant. Le procédés est le même pour nous. Seulement, notre espérance de vie étant considérablement plus longue, nous ne vivons le pon farr que tous les sept ans.

Jim écouta attentivement, souhaitant savoir le plus de choses possible pour être mieux préparé la prochaine fois. Car clairement dans 7 ans ça recommencerait s'il avait bien tout comprit.
- est ce que le pon farr rend toujours aussi... hum... mal en point, malade, instable? Je ne sais pas quel est le meilleur terme... Ou est ce que c'est parce que c'est la première fois ?
Il n'avait pas peur d'affronter le prochaine pon farr de Spock, mais il espérait que son compagnon ne finirait pas aussi mal en point à chaque fois. Et il serait moins prit de cours aussi.

- La première fois est la plus dangereuse car le corps et l'esprit n'y sont pas préparés. La prochaine fois, il est très probable que je sois moins affecté, du moins si je suis toujours maître de mes émotions. Pour autant, oui, l'instabilité émotionnelle et la maladie seront là, je ne pourrai y échapper. Et à chaque fois, mon corps et mon esprit auront besoin de se reconstruire, de se renforcer. Même pour une journée, la pression physique et psychologique est très forte et laisse des séquelles sur les jours suivants.
Spock n'avait plus faim à présent, et il délaissa la moitié de son repas. Alors qu'il parlait, sa tristesse, même enchainée au fond de son coeur, se fit plus forte, et s'il avait été humain, il aurait facilement versé quelques larmes. Comme tous, il avait ses moments de faiblesse, et il aurait souhaité s'isoler.

- ok... mais au moins, la prochaine fois, tu n'auras pas à affronter ça tout seul... je serais là.
Jim voulait être certain que le vulcain réalise qu'il serait là pour le soutenir, et pas seulement pour le Pon farr mais dans la vie de tous les jours. Il décida de s'arrêter là sur le sujet, sachant que ce n'était pas un sujet agréable pour le vulcain, et constatant qu'il avait cessé de manger. S'il y avait des séquelles physique et psychique à la suite du Pon farr, l'humain commençait à mieux comprendre le comportement et l'humeur aléatoires de Spock depuis la veille. Celui-ci contrôlait bien mieux que lui ce que le lien transmettait, mais Jim n'avait pas besoin du lien pour savoir quand ça allait ou pas. Et dans l'instant son partenaire semblait avoir le moral en chute libre.
- tu veux retourner dans ta cabine ?

-Je pense que c'est plus sage.
Spock se leva, apporta son plateau où il serait vidé puis nettoyé, et se dirigea lentement vers les portes, attendant que Jim le rejoigne. Il cherchait la formulation adéquate pour lui faire comprendre qu'il souhaitait être seul. Ne trouvant aucune réponse satisfaisante, il se rangea du côté de la spontanéité et attendit d'être de nouveau devant ses quartiers. Son esprit dériva vers les examens médicaux qu'ils devraient passer le lendemain. Il était certain que Jim serait remis en activité, mais connaissant ses blessures physiques et morales, le médecin chef mettrait sans doute le Vulcain en convalescence prolongée. Spock ne souhaitait pas s'attirer la pitié de l'équipage, et plus il tardait à reprendre son poste, plus les curieux viendraient le questionner et s'immiscer dans sa vie privée. Tout ce qu'il demandait, c'était qu'on le laisse tranquille.

Jim déposa son plateau puis suivit le vulcain, sentant une sorte de tension entre lui et son compagnon, mais qu'il ne savait pas clairement interpréter. Il y réfléchit quelques temps, et fini par associer ça avec ce moment de la veille où Spock lui avait demandé de retourner dans sa cabine. Il savait que la méditation était importante pour les vulcains, et qu'en général elle était pratiqué en privé, pour être plus tranquille. La veille, Jim s'était endormi et n'avait pas dû être trop gênant, mais en pleine journée, il aurait sans doute du mal à rester inactif en attendant que Spock termine de méditer. Peut être était il temps qu'il aille "faire un tour" de manière à accorder un peu de temps à son amant. Il le suivit jusqu'à la porte de ses quartiers, et s'arrêta devant sans entrer. Il irait voir Bones en attendant, il devait le remercier un peu pour son coup de pouce!

- J'aimerais être seul, si cela ne te dérange pas.
Il lui adressa un sourire sans chaleur, puis se retourna et pénétra dans ses quartiers, laissant s'échapper une bouffée de la température ambiante plus élevée. Une fois à l'intérieur, il se débarrassa de son uniforme, qu'il plia consciencieusement avant de le poser sur une chaise, puis alla se vêtir d'un long cafetan vulcain. En des gestes las, il alluma plusieurs bougies et de l'encens, qui diffusa aussitôt une douce odeur épicée, rappelant la cannelle et le safran. Ses yeux se posèrent sur son luth. Il n'avait pas envie de jouer ni d'écouter la moindre note, alors il étendit sur le sol de la cabine un épais tapis aux motifs de son peuple et s'y installa, adoptant sa posture de méditation.
Dès qu'il ferma les yeux, il vit de nombreux souvenirs, de sa mère, de sa planète. Amanda, la réconfortant après qu'il n'ait été une nouvelle fois brimé par ses camarades de classe. Ses attentions, douces et aimantes, sa dévotion, sa chaleur. Il n'avait jamais compris le moindre de ses sourires, et pourtant, en ce jour, ils lui manquaient. Il aurait donné cher pour pouvoir la revoir, pour, ne serait-ce qu'une fois, lui rendre son étreinte. Pour s'assurer qu'elle l'aime toujours malgré qu'il ne le lui ai jamais dit.
Ainsi seul, Spock s'autorisa à extérioriser ses sentiments, et laissa une larme couler sur sa joue. Ses barrières mentales s'effritèrent, et avec, le verrou qui écartait ses pensées de Jim. Le goût salé de la larme vint piquer le bout de sa langue, alors qu'elle s'était écrasée sur ses lèvres. La tristesse n'était pas logique, elle n'avait jamais ramené les morts. Pourtant, il se disait que c'était un mal nécessaire. Il se devait de montrer à quel point il avait été intérieurement touché par sa disparition, exactement deux ans plus tôt, jour pour jour. Son sang se figea à cette constatation, et il se sentit éperdument seul.

- je comprends, prends ton temps, je ne serais pas loin si tu as besoin de moi...
L'humain s'éloigna et retourna dans sa cabine, vérifier ses messages de Starfleet. Il était un peu inquiet pour Spock, mais il était très important pour Jim de respecter les moments de solitude que le vulcain lui demandait, de la même façon que son compagnon le ferait pour lui. Il s'assit donc derrière son bureau, survolant rapidement les messages et la paperasse qui l'attendait, avant de décider de faire un tour à l'infirmerie. Il quitta son appartement et se dirigea vers le turbolift. Alors qu'il y entrait, il perçu l'esprit de Spock qui se rouvrait lentement à lui. Et la première chose qu'il ressentit fut une vague de tristesse dont il comprit après un moment l'origine. Le vulcain était en train de penser à sa mère bien sur... Jim avait toujours eu du mal à imaginer ce que ce pouvait être de perdre un parent. Il n'avait jamais connu son père, quand à sa mère... Elle l'avait très tôt abandonnée à la garde de son oncle avant de repartir dans l'espace... Il lui en avait terriblement voulu d'ailleurs, et bien qu'à l'époque, et encore aujourd'hui, il eu toujours nié avoir été blessé par cet abandon, la blessure n'en était pas moins présente. Mais le cas de Spock était différent... Sa mère l'avait aimé, et l'humain savait que son partenaire avait des regrets concernant sa mort...
Jim hésita à faire demi tour et rejoindre son compagnon, mais il décida qu'il ne devait pas imposer sa présence à celui-ci. A la place, il se concentra pour envoyer une vague de réconfort et d'amour à travers le lien, juste assez fort pour être sûr que le vulcain s'en rende compte, mais en essayant d'en maîtriser au mieux la puissance pour ne pas non plus le déranger. C'était juste sa façon à lui de dire "je suis là, si tu m'appelles, je reviendrais."

Spock ne répondit pas à son message. Il l'avait bien entendu perçu, mais ses émotions, négatives, le rendait irritable et las, aussi il resta silencieux, gardant son attention portée sur tous les souvenirs qu'il avait de sa mère. Il regrettait de ne pas avoir eu le courage ni l'idée de lui montrer à quel point elle était importante à ses yeux. Mais maintenant, c'était trop tard, et les regrets devenaient un lourd fardeau sur ses épaules. Quand il se retrouvait face à son père, il avait l'impression d'être jugé coupable de ce fait, comme si la mort d'Amanda n'était due qu'à Spock, comme s'il l'avait tuée lui-même. Un sanglot de rage le traversa, malgré l'encens et le calme dans la pièce, et il lança contre un mur le premier bibelot qui tomba sous sa main. L'objet explosa en milliers de fragments. Un vase de terre cuite lui avait offert le jour de son admission à l'Académie. Sa douleur augmenta en constatant ce qu'il venait de faire. Et son horreur s'abattit sur son visage quand il prit conscience qu'il perdait totalement le contrôle de ses émotions. Le pon farr avait-il quelque chose à voir là-dedans où n'était-ce que le souvenir du décès d'Amanda ? Et pourquoi mettait-il ainsi si facilement sa perte de contrôle sur le pon farr ? Il n'était plus enfant, il devait se contrôler. Il le devait, ou il était indigne d'être dit Vulcain.
Sa rage retomba mais sa colère était toujours présente. Spock reprit sa place sur le tapis, tout à coup morose et vidé d'énergie.

Tandis qu'il continuait son chemin vers l'infirmerie Jim ressentit la colère de son compagnon mais résista à son instinct qui voulait à tout prix lui faire rejoindre Spock. Malgré tout il se sentit lui-même extrêmement malheureux de ne pas pouvoir aider le vulcain, mais il bloqua comme il put ce sentiment. Spock en avait déjà suffisamment gros sur le coeur pour ne pas en rajouter. Quand il entra dans l'infirmerie son sourire n'était donc pas aussi lumineux qu'à l'accoutumé et Bones en le voyant eu aussitôt l'air concerné :
- dis moi que tu ne viens pas m'annoncer que ça ne marche pas entre le gobelin et toi?
Jim secoua la tête et essaya de rendre son sourire plus affirmé et plus confiant :
- non promis, ça marche très bien entre nous!
- y a intérêt, j'en ai déjà marre de jouer les psy pour couple!
- je passais juste discuter ! Et puis... dire merci... ?
- T'as intérêt à reconnaissant, parce que je te le dis, vous êtes de sacrés imbéciles tout les deux!
- et qui se ressemble s'assemble!
- Je ne trouve pas que vous ayez tant de points communs que ça! à part votre bêtise...
Jim donna une tape amicale sur l'épaule de son ami et ils échangèrent un sourire complice :
- t'as pas quelque chose à boire ? Un bon verre me ferait du bien...
- sûrement pas, je te rappelle qu'officiellement tu es en convalescence !
- Allez... j'ai pas besoin d'être convalescent je suis en pleine forme !
- ça c'est moi qui en décide ! Et Spock comment il va ?
- le plus gros du pon farr semble être passé, mais apparemment il y a souvent des séquelles sur quelques jours... chez lui ce serait surtout au niveau émotionnel... mais physiquement ça peut aller. Je dirais qu'il a juste besoin d'un peu de tranquillité...
- hum... je suppose qu'aller le voir aujourd'hui pour faire un check médical n'est donc pas une bonne idée...
- non pas vraiment...
Le médecin leva les yeux au ciel mais n'insista pas.
- un verre de brandy ça te va?
Jim lui fit son plus beau sourire :
- ce sera parfait !
McCoy alla dans son bureau et revint avec deux verres de brandy. Ils sirotèrent l'alcool en silence, Bones parce qu'il savourait le goût, et Jim parce qu'il essayait de rester à l'écoute de son compagnon tout en tentant de ne pas lui diffuser tout ce qu'il faisait pour ne pas le gêner. Ce qui s'avérait un exercice compliqué pour le jeune homme.

Mais le Vulcain s'était complètement refermé sur lui-même, verrouillant le moindre accès à son esprit. De cette façon, il ne percevait pas les nombreuses réflexions de Jim, ne se doutant pas que dans l'autre sens, ses émotions passaient ses barrières, instables. Parfois, comme ce jour, il lui venait de haïr sa condition de Vulcain. Certes, il y avait de nombreuses avantages, mais le pon farr était de loin le pire des inconvénients.
Après plusieurs autres crises de colère, divers bibelots brisés, et finalement vidé de toute son énergie, il s'assoupit, appuyé sur son lit depuis sa position sur le tapis. Sa tête et son bras gauche reposaient sur le matelas, l'autre était ballant, reposant sur sa cuisse. Il ne rêva pas, mais le sommeil abaissa la moindre de ses défenses et son esprit s'ouvrit complètement, vulnérable.

Jim essaya de demeurer calme en apparence pour ne pas inquiéter inutilement McCoy, mais plus le temps passait plus il sentait les émotions de son compagnon aller en s'aggravant, oscillants entre tristesse et colère. Et non seulement ça angoissait Jim mais qui plus est, ça le rendait lui même instable dans son comportement. Tandis qu'il discutait avec Léonard, il s'agaçait des fois d'un rien ou entamait des conversations qu'il n'aurait normalement pas lancé, car elles abordaient des sujets sensibles pour lui. Il était encore incapable de se protéger des émotions qu'il recevait de Spock, et maintenant il regrettait qu'ils n'aient pas d'ores et déjà commencé à travailler là dessus. Au bout d'un moment ni tenant plus il se leva d'un bon, salua à peine le médecin et sorti sous l'air effaré de son ami qui n'eu même pas le temps de demander pourquoi. Il repartit en direction du turbolift, sentant l'esprit de Spock se calmer, se faire plus discret... Tandis qu'il activait le turbolift il fini par comprendre que le vulcain avait dû s'endormir. Dans un sens il se sentit soulagé pour Spock, mais aussi pour lui-même, son état d'esprit revenant peu à peu à la normal, bien que l'inquiétude demeura présente. Quand le turbolift s'arrêta il sortit et fit son chemin jusqu'aux quartiers du vulcain, saluant à peine les membres d'équipage qu'il croisait.
Arrivé devant la porte il hésita puis entra sans sonner, ne voulant pas réveiller le vulcain. Dans l'immédiat, dormir était peut être la meilleure option pour lui. Quand il entra, la première chose qu'il constata furent les divers objets brisés à travers la pièce. Pour que Spock en arrive à un tel comportement, il devait totalement perdre le contrôle... Jim tourna les yeux vers son amant et le trouva effectivement endormi, mais à en juger par sa position, le sommeil était arrivé sans prévenir. Traversant la pièce sans faire de bruit, il approcha et vint s'agenouiller à ses cotés. Il caressa doucement ses cheveux et son visage, prenant garde ne pas le réveiller. Il songea à le déplacer sur le lit, mais n'était pas certain d'avoir la force nécessaire pour le faire, aussi préféra t-il attraper les coussins, les installer sur le tapis et allonger doucement son compagnon dessus. Ceci fait, il attrapa le drap et le recouvrit avant de se redresser. Il entreprit de ramasser les bibelots brisés et les posa sur le bureau, préférant ne rien jeter sans l'accord de Spock. Tout en s'affairant il garda un oeil sur le vulcain, espérant que dormir l'apaiserait un peu. Quand il eu fini il vint s'asseoir en tailleur près de lui en appuyant son dos contre le lit, glissa une main dans les cheveux d'ébène et ne bougea plus, attendant patiemment que son amant se réveille.

Bien que ne rêvant pas, le sommeil de Spock était agité, assez léger, et diverses émotions passaient, tirées des souvenirs ravivés ou d'impressions plus récentes. Son esprit était tellement ouvert et sans défense, que le premier télépathe aurait pu avoir accès à son entièreté. Heureusement, la présence et le contact de Jim le calma et le reste de son repos fut tranquille. Il dormait à poings fermés.
Lorsqu'il s'éveilla, près de deux heures plus tard, il remarqua d'abord la légère pression des doigts sur sa tête, puis les oreillers et la couverture. Ses yeux s'ouvrirent doucement, et il vit son amant.
- Merci pour la couverture. Et pardon. Je ne fais pas honneur à mon peuple...

Jim tourna les yeux vers le vulcain et sourit tendrement :
- tu n'as pas à t'excuser... tu ne fais honte à personne.
Et puis de toute façon, l"humain n'en avait strictement rien à faire que le vulcain agisse avec honneur en sa présence. Du moment qu'il allait bien, son comportement n'était pas du tout un problème. Il espérait juste qu'avec le temps, Spock comprendrait qu'entre eux il n'y avait nul besoin de se cacher derrière les apparences. Mais chaque chose en son temps... L'essentiel c'est que dans l'immédiat, le calme était revenu dans l'esprit de Jim, le lien ayant cessé d'envoyer toute la colère et la peine du vulcain vers son partenaire.
- tu te sens mieux ?

Spock s'assit en tailleur face à Jim, gardant la couverture serrée autour de lui. Ses doigts frôlèrent les siens, du bout de la pulpe. Son visage était plus détendu même si son contrôle sur ses émotions n'était pas revenu.
- En effet, je vais mieux. Je te prie d'excuser ce moment que ton peuple appelle la "déprime". Certains souvenirs me sont revenus et il était difficile de les bloquer, mes barrières mentales sont encore considérablement fragilisées. Je pense qu'à terme, si elles ne se restructurent pas, il faudra que je me tourne vers le kolinahr.
Tout en parlant, son regard s'était tourné sur les objets brisés que Jim avait rassemblés et posés sur son bureau. Incapable de les jeter, il faudra qu'il tente de les réparer, même si ce ne serait plus pareil ensuite.